23 octobre 1959

Le gros ennui est arrivé. Je n’ai pas tenu compte de mes propres conseils. J'ai été trop franche, j'ai trop dit, j’ai dépassé la limite. Il faut absolument m'habituer à garder certaines choses en moi. Si je n'y arrive pas, au pire les raconter à Alina, mais pas à Sandou.


Alina a raison, il ne faut pas lui dire, en aucune façon que : j'aurais préféré qu'il soit Hongrois, plus haut que moi, plus intelligent et ayant un meilleur métier. C'était une énorme bêtise de lui raconter hier, ce que papa m’avait dit de lui, et aussi de lui raconter mes problèmes de santé. Je n'aurais pas dû lui avouer que ça me heurtait encore, j'aurais dû supporter ou trouver une raison pour m'en aller. Donner gratuitement. Sans exigences.

Á partir de dimanche, pendant dix jours, je serai ainsi : tendre, bonne, ouverte, douce, obéissante, chaleureuse. Et je tiendrai ma langue. J'ai déjà appris pas mal, je vais apprendre aussi ça. Il le faut. Il faut que j’apprenne à donner sans réfléchir ou m’auto-déchirer ! alors je recevrai forcément, sans le demander, davantage. Manœuvrer sans avouer à ton mari que tu sais ce que le mot “stratégie ou tactique” veut dire.

Encore cinq mois sont passés et je peux dire avec fierté : je connais 2500 mots d’anglais. Je lis déjà des romans policiers et des pièces de théâtre, je papote et je comprends quand ma jeune enseignante me raconte pendant une heure ses problèmes avec son copain.

Je verrai ce qui arrivera. Il faut écouter Alina, les anglais disent :
Two heads are better than one
(deux avis vont mieux qu'un.)


Ils ont beaucoup de proverbes intelligents, aussi : Good words cost nothing but are worth much ! Les bons mots ne coûtent rien, mais valent beaucoup.

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