10e journal, début


Aujourd’hui, le 23 avril 1968, mon mari a rompu notre amitié. Et, à cette occasion, à 34 ans, j’ai complètement failli (la première fois ?) comme femme, comme amante. J’ai failli comme épouse et je suis bonne à être jeté aux ordures.

Je l’énerve surtout. Sandou croit que je veux l’enfermer, que je veux qu’il s’occupe seulement de moi et avant-hier, il m’a dit :
« On ne fait pas de contrat d’amour, ça n’existe pas ! »

J’ai deux petits enfants qui ont encore besoin de moi.

Déjà à mon approche, mon mari se sent près d’une crise de nerfs. Je dois faire quelque chose avec mes sensations, elles dominent trop ma pensée. C’est très mauvais. Mon beau-frère avait raison quand il m’avait dit : ce qu’on n’a pas le droit de faire, on en a encore plus envie.
Mon mari est amoureux d’une autre, j’en suis sûre maintenant. C’est épouvantable de sentir que celui qui m’a aimée, d’un coup, ne m’aime plus ! Depuis que je lui ai dit que je divorcerais s’il ne changeait pas son comportement, il se domine, il ne hurle plus, mais il est froid, si froid et fermé !

Il y a deux ans, il regrettait encore de me faire du mal, cette fois-ci, il me répète seulement que nous avons vieilli, qu’il ne peut pas s’occuper tout le temps de moi et que je suis aigrie. C’est possible que ce soit vrai - c’est horrible.

Tout a commencé il y a deux ans, quand il s’est avéré que mon mari n’était ni mieux, ni plus fidèle, que les autres. Comment ai-je pu me tromper autant ? Ou je n’en méritais pas un meilleur ?

Moi, toujours optimiste, je suis devenue sceptique. Tant que j’avais été sûre de son amour, j’étais heureuse n’importe où et dans n'importe quelles conditions. Pleine de bonheur qu’un homme m’aime, que j’ai une fillette et un fils. J’éprouvais de la joie quand le soleil brillait et s’il pleuvait, j'étais enchantée de l’odeur de la pluie ; contente d’une sortie ou de rester à la maison.

D’un coup, quelque chose s’est déchiré en moi. Je n’arrive plus à me réjouir comme avant, je n'éprouve plus autant de bonheur même avec mes enfants. Et, à peine ma blessure refermée, ça recommence, encore plus grave.

Je dois chercher une rive solide, mais où ?

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