25 octobre 1980, Düsseldorf, Allemagne

C'est comme si des années s'étaient écoulées, pas seulement une semaine. Des haut, des bas, un jour c’est mieux, l’autre mauvais, une nuit passée avec papa pleine de souffrance, puis une meilleure journée, ensuite "où est le canif" (pour pouvoir s’évader), puis il recommence à marcher, manger, parler plus normalement et ensuite, il délire de nouveau. Un jour il est tout à fait bien et j’espère, je suis heureuse et ensuite de nouveau il s’exclame : “ils vont m’achever, libérons-nous d'ici”.

Il a peur de la mort et cherche un coupable, un ennemi - mais il y a de la logique dans son délire... Il rêve de guérir, de pouvoir bien manger et boire, d’avoir autour de lui tous ses amis et de jouer aux cartes avec eux. En réalité c'est normal de montrer, d'exprimer ce qu'on désire, mais ce qui me fait tellement mal au cœur c'est que je sais que ses désirs ne vont plus se réaliser, qu'ils ne sont plus possibles.

Demain je demanderai au docteur comment il faut se comporter en face des pareils souhaits. Et puis, il mélange la peur de la mort avec la manie de persécution. Il se souvient très bien et en détail des événements fort anciens, mais il ne sait pas ce qui est arrivé il y a un instant et me demande encore et de nouveau :
- Où sommes nous ?

Je sens mon cœur se déchirer ; personne ne m'avait dit que ça pouvait arriver, ni comment réagir et comment lui répondre ?

- Tu sais, je n'ai jamais été poltron, mais je suis devenu. J'ai tellement peur qu'on m'achève. Je dois fortifier mes nerfs, je sais que c'est très important, me dit‑il.

Ma présence lui fait du bien, mais quand je devrai partir, qu'arrivera-t-il ?! Il est tellement vulnérable, il a tellement besoin d'aide, comme un petit enfant. C'est cela qui me chagrinne tant.

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