Jeudi, à quatorze heure, le 22 octobre 1998.

La secrétaire vers qui le président de l’association m’a envoyé, m’a rassurée :

- Il y aura plein de salles, un à la deuxième, l’autre au premier étage.

- Alors, décidons, attribuez un à l’atelier d’écriture.

- On a le temps, tout dépend combien serez-vous. Rencontrez-les au début au Foyer.

- Il y a eu des inscriptions ?

- Un seul pour le moment, mais peu s’inscrivent avant la première réunion.

- Aurai-je des participants ?

Ai-je bien expliqué de quoi s’agit-il dans la revue? J’avais seulement quelques lignes, il y a beaucoup d’activités diverses dans ce club de Paris et depuis sept ans déjà. Je suis pour eux « novice », inscrite dans le club seulement depuis une année.

J’ai tenu mon cours habituel d’Informatique aux trois étudiants présents, juste assez pour qu’ils puissent suivre mes explications devant l’écran de Macintosh. Je les laisse ensuite s’exercer devant trois ordinateurs et je vais manger rapidement des brochettes dans le petit resto japonais de coin.

Une demi-heure avant l’atelier, je vais voir la secrétaire.

- Au foyer, aujourd’hui, me dit-elle.

Je fais rapidement des affiches, je les colle et je m’assois à côté d’une grande table du foyer. Sept autres chaises autour. Trop? Assez? Nous verrons.

Il faudrait qu’on soit au moins cinq, au maximum douze. Le temps passe lentement. Encore vingt minutes à attendre.

À deux heures moins dix, la première participant arrive.

- Je ne suis pas enseignante, je n’ai pas écrit beaucoup. J’ai regardé mon journal, que j’ai tiens…

- Alors, ça ira sûrement.

- Vous croyez ?

- Nous sommes là pour nous exercer, chacun de nous s’améliorer relativement à soi.

Un deuxième arrive. Troisième. À deux heures, il faut ajouter des chaises autour du table. Un homme et onze femme, retraités.

Nous faisons le premier tour de table, puis nous nous lançons dans un jeu d’écriture collectif, ça démarre bien. On commence à relire.

Le président du Club tout rouge, fait son apparition.

- Vous auriez dû commencer à deux heures et demie seulement.

- Vous êtes bien venue.

- Non, il ne s’agit pas de cela, on ne peut pas tenir l’atelier au foyer et il ne peut pas avoir lieu jeudi.

- Mais c’était prévu pour jeudi, deux heures.

- Nous avons tous programmé notre temps pour les jeudis après-midi, disent les participants, les uns après les autres.

- Il n’y a pas de salle libre jeudi, ni mardi. Tenez-le mercredi.

- Mercredi ? nous gardons nos petits-enfants.

- Vendredi après-midi alors.

- Moi, je pourrais venir le vendredi, mais les autres protestent.

- Bien, faites une liste pour voir quel jour vous convient. Mais pas le jeudi.

- Il y a une semaine, on m’a dit…

J’argumente.

- On nous a promis jeudi, c’était écrit dans le magazine, ajoute furieusement une des participants.

Le président sort, furieux.

- Qu’allons-nous faire ? dit l’un.

- À peine nous avons pris goût… dit l’autre.

Cela ne fait rien. « Impossible », j’ai déjà entendu. La plupart de temps, on trouve un moyen. Cette fois, aussi.

- Mettons-nous à écrire !

Ils ne se sont pas arrêtés jusqu’à cinq heures.

- La prochaine fois, nous pourrions rester d’avantage ! disent-ils.

- Mais où allons nous le tenir ? me demandent-ils.

Pendant qu’ils écrivaient, je suis allée parler avec la secrétaire et j’ai demandé un sursis, encore un jeudi dans deux semaines, puis, on verra ce que nous ferons dans un mois. Quelque chose surgira d’ici là.

Bien. Peut-être dirons-nous au groupe poésie de ne venir qu’une fois sur deux, comme vous ou de le tenir la deuxième fois une autre journée.

J’étais convaincue qu’on trouverait quelque chose avec le temps. Je reviens optimiste vers le groupe plongé dans l’écriture depuis un quart d’heure.

« De quoi je ne me souviens pas ? » Lisez ce que vous avez écrit.

Nous avons entendu des textes fort divers qui nous ont plu, nous ont ému.

Une d’eux ne se souvenait pas de ses rêves, pas comme ses copines, qui elles… L’homme ne se souvenait plus du visage de son copain d’enfant, mort en Algérie. La troisième, ouvre son frigo plein et se dit : « je ne me souviens pas d’avoir fait cela dans ma jeunesse, ma mère n’avait ni de frigidaire, ni des provisions d’avance.

Des textes forts, puissants.

- Au revoir ! dans deux semaines.

- Et si nos n’aurons pas une salle ici, nous irons écrire au café.

Un d’entre eux : probablement je vous proposerai un lieu.

Nous trouverons, nous écrirons, nous avons pris confiance, nous voulons continuer Marcher, apprendre, s’embrasser, s’épanouir, se rencontrer. Écrire.

Ce ne sera plus ‘la première fois.’

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